Ciné-collectif Metz pour CDAC
– 6 septembre 2016
La CDAC si elle donne son accord pour l’implantation de KINEPOLIS group à MUSE dans le quartier de l’amphithéâtre créera un situation de concentration inédite en France : le demandeur, déjà implanté à Saint Julien, autorisé à WAVES , signataire d’un bail emphytéotique de 27 ans signé avec la Municipalité de Metz pour l’exploitation du PALACE , bénéficiera d’ une situation hégémonique ( 35 salles ) qui lui livrera et pour longtemps la totalité des équipements et de la programmation cinématographique dans Metz et toute son agglomération
L’engagement de programmation , proposé par le demandeur est sans doute alléchant . C’est la loi du genre. Mais hélas, le rapport sénatorial Lagauche (2014) déplore l’absence de contrôle et de sanction des engagements non tenus, alerte sur les abus de position dominante générés par la concentration massive des multiplexes et demande aux pouvoirs publics, notamment au sein des CDAC, de veiller aux équilibres nécessaires au maintien de la pluralité de l’offre. Plus récemment , dans son rapport cité dans le Monde du 9 juin 2016, l’avocat Pierre Kopp, mandaté par la Société civile des auteurs, réalisateurs, producteurs et distributeurs, fait part de sa »stupéfaction » devant la domination des grands groupes sur la filière du cinéma qui nuit profondément à la diversité du cinéma français »
Un dispositif connexe à celui qui est soumis à la CDAC aujourd’hui confie l’exploitation du cinéma du centre ville au même demandeur KINEPOLIS group pour une programmation de type Art et essai censée rassurer et maintenir la diversité et la qualité de l’offre actuelles . Or, on peut d’ores et déjà gager que KINEPOLIS, seul maître à bord, pourra se contenter d’une programmation a minima : on sait que ce label, en cours de révision parce que trop extensif , est souvent représenté dans les programmations des grands opérateurs par des films porteurs et rentables, au détriment des salles qui diffusent une création artistique pluraliste, exigeante et novatrice.
L’aménagement cinématographique, si l’autorisation d’installation était accordée , serait en contradiction totale avec les orientations récemment adoptées par les pouvoirs publics en concertation avec les acteurs professionnels du cinéma
En effet, les Assises du Cinéma qui se sont tenues en 2015 ont alerté sur les dangers d’une trop grande concentration des opérateurs multiplexes : la toute nouvelle loi Création, patrimoine et architecture votée le 21 juin 2016, propose donc des dispositions destinées à mieux réguler le secteur , à renforcer les engagements de programmation et leur contrôle et à sauvegarder le secteur indépendant et d’Art et essai, mais , hélas, les décrets n’étant pas encore signés, elle sera sans effet sur la situation actuellement en question à Metz.
Le demandeur , KINEPOLIS group, est le seul postulant . Nous aurions aimé que d’autres opérateurs soient sollicités : UGC , GAUMONT par ex. par ailleurs présents dans d’autres villes de la grande région
Cette situation n’est pas saine , d’autant que KINEPOLIS nous a été présenté par les professionnels consultés et par de hauts responsables de la culture comme un groupe peu enclin à des aménagements tarifaires pour les actions éducatives, très peu ouvert dans sa politique salariale, nettement moins disant en matière d’offre cinématographique .
Le groupe dans ses rapports d’activité, dont la lecture éclairerait de façon très instructive le dossier présenté ce jour à la CDAC , déclare sans ambages ses objectifs, fort éloignés d ‘une préoccupation culturelle ou éducative : »L’approche adoptée ( stratégie d’expansion, nouveaux projets et acquisitions) consiste à mettre en valeur le potentiel d’amélioration de la cible et donc à créer de la valeur pour les actionnaires » ( rapport 2013) Le cinéma n’est qu’un pan mineur de son activité répartie en multiples domaines : salles et espaces de jeux, acquisitions et location d’immeubles , marketing d’entreprise, vente de produits dérivés, restauration. Les programmes cinématographiques occupent une page sur les quelques 110 pages des rapports et sont présentés exclusivement à la lumière des parts de marché générées par les films à succès du box office.
Pour conclure : approuver aujourd’hui l’installation à MUSE, sans concurrence, sur la seule foi de ses engagements de programmation, d’ un opérateur considéré généralement comme peu fiable et moins disant , créerait une situation de monopole quasi irréversible, extrêmement dommageable pour la liberté des citoyens spectateurs, générerait une baisse considérable de la qualité de l’offre cinématographique à Metz et serait contraire aux orientations nationales actuelles en matière d’ aménagement cinématographique